Vous connaissez ce film où ce bon vieux Bill Murray ne cesse de se réveiller le jour de la marmotte? C’est un peu ce qui s’est produit le 2 mai dernier alors qu’Intact prenait tout le monde par surprise et achetait la compagnie d’assurance Jevco. C’était le jour de la marmotte, car près d’un an plus tôt jour pour jour, la même société faisait l’acquisition de sa grande rivale, AXA, de façon tout aussi inattendue.
De bonnes acquisitions
Intact a fait ses acquisitions de façon gourmande mais réfléchie. En intégrant les deux concurrents, l’entreprise a acheté sa compétence en responsabilité professionnelle, en agricole, en bris des équipements et en véhicules récréatifs. Elle a consolidé ses forces en cautionnement et en risques standards. Elle a mis une croix sur d’importants compétiteurs. Impressionnant.
Oligopole
Du côté des observateurs et des consommateurs, les réactions ont été unanimes : « Ils vont tout acheter… on va se retrouver devant un monopole! » En effet, alors que par exemple il y a un an à peine, trois joueurs se partageaient 75% du marché du cautionnement, il n’en reste qu’un : Intact. La compagnie contrôle maintenant plus de 14% du marché canadien en assurance de dommages. Il ne reste que 65 compagnies d’assurances au Canada. Pas toutes majeures.
Bien entendu, la loi canadienne sur la concurrence empêcherait Intact, si jamais cela faisait partie de ses ambitions, de devenir un monopole. Le constat est toutefois clair : la concentration des compagnies d’assurance est un phénomène continu et les consommateurs se retrouveront bientôt, si ce n’est déjà fait, devant un oligopole. Qui dit baisse de la concurrence dit nécessairement hausse des prix et souvent baisse de la qualité du produit.
La partie n’est pas gagnée
Nombre d’entreprises ayant cru par acquisitions se sont retrouvées avec des problèmes de croissance. Garda, une entreprise ayant tout acheté sur son passage, s’est vue crouler sous les dettes quelques années plus tard, et frôler la faillite. D’autres compagnies, se retrouvant dans une position de force trop prononcée, ont souvent délaissé l’innovation, l’écoute de la clientèle et l’évaluation des menaces périphériques. Les chutes ont parfois été violentes… GM, Netscape, Yellow Pages.
Intact a fait deux acquisitions majeures dans des contextes favorables : l’économie canadienne et les revenus de placements se portent relativement biens, et l’écrasante majorité des compagnies d’assurances canadiennes font des profits années après années.
La corporation n’est toutefois pas à l’abri des menaces qui planent sur l’industrie. Tout d’abord, l’économie pourrait s’essouffler, entrainant du même coup le vieillissement du parc automobile et immobilier. Deux aspects négatifs : moins de primes perçues, et plus de réclamations liées à l’entretien parfois déficient des biens plus âgés.
Ensuite, il y a l’éternelle menace des changements climatiques. Ceux-ci pourraient s’intensifier à un rythme soutenu et causer de plus en plus de dommages aux résultats des compagnies d’assurance. Et encore plus pour un assureur en biens divers comme Intact (un assureur de responsabilité professionnelle, par exemple, ne serait pas touché par ce facteur).
Finalement, des joueurs majeurs venus de l’étranger pourraient être tentés par l’aventure canadienne et venir mener une guerre commerciale à Intact. Avec les États-Unis qui pataugent, l’Europe qui dérive et les marchés émergents qui demeurent souvent des points d’interrogation au niveau de la stabilité, le Canada et une industrie bien établie comme celle de l’assurance pourrait tenter nombre d’investisseurs…
À suivre…